GESTION PREVISIONNELLE DES EMPLOIS ET DES COMPETENCES DES CADRES DE LA TERRITORIALE ET SON IMPACT SUR LE PROJET PDL-145 TERRITOIRES EN RD Congo
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- 31 oct.
- 18 min de lecture
Crispin David MWENGEMOMUNGU

Résumé
La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences est une approche à court, moyen et long terme dans la gouvernance de toute organisation socio-économico-politique y compris dans la territoriale. Lorsqu’une structure fait face à des changements importants, elle est appelée à y recourir. La réussite ou l’échec de tout projet en dépend. La RD Congo en optant pour le lancement du projet de développement à la base des entités administratives décentralisées et déconcentrées » PDL- 145 Territoires » avait mis en place différentes stratégies de gestion pour sa réussite. Les autorités territoriales sont des piliers pour son succès. Cette étude nous amène à analyser le recrutement des cadres territoriaux effectué pour faire aboutir ce projet.
Mais les résultats nous ont monté que l’approche de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des cadres territoriaux n’a été prise en compte par le gouvernement dans le projet PDL-145 Territoires. Aujourd’hui, le projet est aux arrêts et nécessite une relecture.
Mots clés : gestion prévisionnelle, cadres territoriaux, développement local, projet, République démocratique du Congo, 145 Territoires.
Introduction
De l’histoire de la République, en dépit de quelques initiatives sporadiques que le pays a connu, le projet PDL-145 territoire est le 1er projet de développement durable qui couvre et s’exécute sur tout le territoire national au même moment et touche plusieurs secteurs de la vie. Ce projet constitue une réponse programmatique à une demande sociale multidimensionnelle et urgente des congolaises et des congolais, notamment celles et ceux vivant dans les zones rurales des 26 provinces du pays. Il doit contribuer à réaliser à court et moyen termes, le développement local endogène. Il ne se substitue pas au programme gouvernemental mais en constitue un accélérateur. Il s’inspire du modèle de développement local endogène et des modèles de territorialisation équilibrée des politiques publiques en vue de vaincre les disparités spatiales en termes de développement humain durable dans le pays, tout en favorisant la convergence des revenus et des conditions de vie des populations rurales et urbaines » (République démocratique du Congo 2021).
De toutes les entités administratives du pays, celles qui nous intéressent directement dans cette recherche sont les territoires, les secteurs et les chefferies. Car, en effet, ce sont ces entités qui sont concernées directement par le projet. Or, pour réussir dans ce projet, le pouvoir public ne peut pas se passer des cadres territoriaux.
La politique de recrutement est déterminante pour disposer des cadres compétents dotés de savoir, savoir-faire, savoir-être et savoir-vivre capable d’accompagner le projet vers son achèvement. Tout cela passe par une gestion prévisionnelle d’emplois et des compétences.
Les préoccupations qui nous animent, dans cette recherche, sont celles de savoir si la gestion des cadres de la territoriale en RD Congo est assise-t-elle sur une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ? Quelles seraient les implications de cette politique sur le projet PDL 145- territoires ?
Au regard de ce qui précède, nous pensons que la réalisation de ce projet est loin d’intégrer la gestion prévisionnelle des emplois et de compétences des cadres territoriaux. Cet état de chose n’est pas sans conséquence surtout dans l’implication de ces cadres, la politisation de l’administration publique oblige.
Pour bien mener ces recherches, nous avons recouru à la méthode dialectique pour mieux comprendre les contradictions éventuelles qui existeraient dans la conception de projet et la volonté de le voir réussir. En effet, ces contradictions ne sont sans conséquences pour la suite de la réalisation.
Les techniques d’entretiens libres et l’analyse documentaire nous ont permis de récolter les données et les analyser. Ces entretiens ont eu lieu avec certains cadres territoriaux, hauts cadres du secrétariat général du ministère de l’intérieur, décentralisation, sécurité et affaires coutumières ainsi que du Bureau central de coordination, BCECO en sigle. Pour compléter les informations obtenues par les entretiens, nous avions fouillé certains textes légaux et règlementaires, les rapports d’activités ainsi que des documents scientifiques.
Dans la présentation, ce travail comporte, outre l’introduction et la conclusion, trois points, à savoir :
- Les considérations générales sur les concepts ;
- La présentation et analyse du projet PDL 145 territoires et le développement local en RD Congo ;
- L’analyse de la gestion prévisionnelle des emplois et compétences des cadres territoriaux et le développement local en RD Congo.
I. LES CONSIDERATIONS GENERALES SUR LES CONCEPTS
I.1. La politique du recrutement
Toute organisation, pour son fonctionnement, a besoin des hommes ou d’un personnel pour mettre en œuvre sa politique, mieux, réalisation son objet social. Ces hommes et femmes à mettre à la disposition d’une entreprise passent par un processus que nous appelons recrutement (Inaka 2025, Peck 1996).
C’est pourquoi, Tshilombo (2020 99)pense que ‘’le recrutement est l’ensemble de procédés utilisés par les entreprises pour acquérir les personnes les mieux indiquées pour occuper un poste vacant ou susceptible de le devenir dans une organisation. Nous pouvons encore dire que le recrutement est l’ensemble des procédures qu’utilisent des entreprises pour acquérir la main d’œuvre en quantité et en qualité voulue. Il y a lieu de noter que le recrutement est souvent une opération complexe faite de multiples séquences, souvent longue et dans laquelle, interviennent de nombreux participants’’.
L’enjeu de la capacité à attirer des personnes qualifiées et à prendre les bonnes décisions en matière de sélection est un facteur de réussite dans un environnement compétitif. Le recrutement constitue une ouverture sur l’extérieur.
Cette politique d’attirance des bonnes personnes passe, par les différentes phases notamment la définition de poste, la définition de profil, l’identification des sources de recrutement, la mise en place des moyens de recrutement, la campagne de recrutement, la sélection, la décision d’embauche et l’intégration.
En effet, tout recrutement commence par une phase préparatoire qui part de l’identification des besoins émanant des cadres hiérarchiques ou de proximité, d’une mutation ou d’un nouveau besoin, de l’anticipation des besoins par le processus de la gestion prévisionnelle d’emplois et des compétences. Il passe ensuite par l’analyse et la description des postes, la recherche des candidatures en interne ou en externe de l’organisation, la sélection des candidats via le tri par les CV et les tests. Dans tous les cas, il y a que les meilleurs qui seront retenus et intégrés dans l’entreprise.
I.2. Les cadres territoriaux dans le contexte congolais
Conformément aux dispositions de la loi organique n° 08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l'Etat et les Provinces, en RD Congo, le territoire nationale est subdivisé en provinces, villes, territoires, communes, quartiers, secteurs et/ou chefferies, groupements, villages, avenues (République démocratique du Congo 2008).
Ces entités sont regroupées en deux catégories : d’un côté les entités administratives décentralisées, ETD en sigle et de l’autre côté les entés déconcentrées.
Parmi les entités territoriales décentralisées, nous avons la ville, la commune, le secteur et la chefferie. Elles sont dotées de la personnalité juridique et de l’autonomie de gestion de leurs ressources humaines, économiques, financière et technique. Ces compétences constituent une exigence pour la bonne gouvernance de la chose publique et surtout l’impulsion pour le développement durable local. Elles leurs sont conférées par la constitution et les lois de la république.
Au niveau des entités administratives décentralisées, les cadres territoriaux sont des dirigeants, les gestionnaires de ces entités. Conformément aux dispositions de la loi n° 08/012 du 31 septembre 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces, les provinces et des ETD sont dotées de la libre administration. Cette libre administration se caractérise généralement par : l’élection des organes de décision et de gestion de l’entité en vue de promouvoir le développement à la base. Cependant, les chefs de la chefferie sont désignés et investis par l’arrêté selon la coutume locale dans le respect de la loi sur le statut des Chefs coutumiers (République démocratique du Congo 2008).
En plus de ces entités, nous avons également les entités déconcentrées. Il s’agit principalement de territoire. Pour l’Encyclopédie du Développement Durable, écrit par Bôas and Gilon (2015) ‘’un territoire, est une surface physique délimitée par des frontières administratives ou politiques qu’il gère et il n’en connaît pas d’autres’’ « Encyclopédie du Développement Durable, 2007, p.3 ». Pierre-Noël Denieuil (2005:8), pour sa part, toute en confirmant la définition donnée par l’encyclopédie, il va un peu plus loin en ajoutant d’autres considérations, aussi, important. Pour lui, un territoire se définit soit par une homogénéité physique et géographique, soit par une identité socio-culturelle, ou encore par une localisation sectorielle et industrielle ».
En fait, celui-ci est une entité administrative composée des secteurs et des chefferies et dirigée par l’Administrateur du territoire avec ses deux adjoints dont l’un s’occupe des questions administratives et politiques et l’autre des questions économiques et financières. Ils sont tous agents publics de l’Etat soumis aux dispositions de la loi n° 08/012 du 31 septembre 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces quant en ce qui concerne leur recrutement par concours et la gestion de leur carrière (République démocratique du Congo 2008).
Dans tous les cas, de toutes les deux catégories de cadres territoriaux, l’objectif final de leur gouvernance est d’amener ces entités au développement.
I.3. Notions, Facteurs et Acteurs du Développement territorial
Les ressentes recherches de Sabhi (2024) nous renseignent que les bases de la réflexion sur le développement économique au niveau territorial date des années 1920-1930 et elle a évolué jusqu’aux années 1990.
En effet, lorsque nous parlons de développement territorial, nous voulons faire allusion au développement au niveau de la base, local. Par ce concept, nous entendons le lieu de l’action concrète. On ne dira jamais assez combien cette réduction de l’action et du concret à l’immédiat, à l’immédiatement tangible, comporte de perversions. L’action responsable des citoyens, la mise en cohérence des discours et des actes sont évidemment essentielles mais à condition que soient établis les liens et fédérés les efforts du local au mondial.
Il y a lieu de noter que le développement territorial ne se limite pas au seul aspect économique, mais également sociales, environnementales ainsi que la participation des parties prenantes c’est-à-dire gouvernement, entreprises, société civile.
Nous sommes d’avis avec Georges Gontcharoff (2002:3) que le développement est « territorial », lorsqu'il touche une zone géographique définie, rurale ou urbaine, mais dont les facteurs constitutifs et le périmètre sont bien difficiles à définir. Se mêlent des éléments géographiques, historiques, urbanistiques, de mémoire collective et d'identité, de volonté et de capacité à travailler ensemble ».
Il serait audacieux de limiter les facteurs susceptibles d’exercer une influence significative sur le développement territorial. Ce qui est vrai, le développement territorial n’est pas l’œuvre de la volonté d’une seule personne. Il est la résultante de la combinaison de plusieurs facteurs.
Notons que ces facteurs peuvent être classiques de développement ou non. Parmi les facteurs classiques, nous pouvons relever : la situation géographique, les ressources naturelles, le marché, la main-d’œuvre ou aides des pouvoirs publics, les mutations économiques, les changements sociaux et sociétaux, les bouleversements politiques et institutionnels, les nouveaux défis environnementaux et énergétiques et la nouvelle configuration des territoires. En sus, les facteurs non classiques qui viennent de faire leur émergence sont, entre autres l’innovation, la formation, l’insertion dans des réseaux, l’identité territoriale, une gestion stratégique, la gouvernance, la compétitivité, la technologie, le tourisme, les infracteurs, les équipements, ...
De toutes les façons, ces facteurs ne sont pas exclusifs et peuvent dépendre des contextes internes ou externes de chaque entité territoriale.
Quant aux acteurs, il convient de noter que les bonnes pratiques de développement territorial, un moteur « à quatre hélices » est nécessaire au minimum, c’est-à-dire une impulsion qui comporte la participation active du secteur public local, du secteur privé de l’entreprise, du secteur de la connaissance et de la société civile. En des termes plus clairs, nous avons : secteur public : l’ETAT, secteur privé de l’entreprise, société civile, secteur de la connaissance (recherche, formation-diffusion), secteur financier (public ou privé), organismes d’intégration régionale et de coopération internationale.
A présent, nous pouvons passer en revue le projet PDL 145 Territoires et le plan de développement local en RD Congo.
II. L’ANALYSE DU PROJET PDL-145 TERRITOIRES ET LE DEVELOPPEMENT LOCAL EN RD CONGO
Le projet PDL 145 Territoires dans sa conception vise plusieurs objectifs global et spécifiques pour le développement de la RD Congo.
En effet, l’objectif global vise à corriger les disparités de développement humain durable entre les milieux urbain et rural, de réduire la pauvreté et les inégalités croissantes et transformer les conditions de vie des populations en améliorant significativement l’offre publique de services socio-économiques de base dans l’ensemble des territoires.
En sus, l’amélioration de l’accès des populations rurales aux infrastructures et services socioéconomiques de base, la promotion du développement des économies locales et rurales, à travers notamment la promotion de l’entreprenariat rural, le renforcement de la productivité agricole, la valorisation de la production agricole et l’amélioration de l’accès des entrepreneurs ruraux aux services financiers, le renforcement des capacités de gestion du développement local et le développement et la mise en place un système de suivi-évaluation géo référencé sont des objectifs spécifique du projet PDL-145 T.
Hormis ces objectifs, Ce projet s’articule sur quatre composantes majeures, à savoir :
- L’amélioration à l’accès des populations des territoires ruraux aux infrastructures et services socio-économiques de base ;
- La promotion du développement des économies rurales et des chaines de valeur locales ;
- Le renforcement les capacités de gestion du développement local ;
- Le développement d’un système d’information géo référencé de suivi à même de renseigner sur les progrès du programme.
- Comme nous pouvons nous rendre compte, il s’agit d’un projet qui prends en compte les composantes transversales qui tient en compte les dimensions genre, environnement et droits de humains fondamentaux.
Par ailleurs, Investissements prioritaires du PDL- 145 T démontre que ce projet ambitieux qui vise la promotion et l’émergence d’une économie locale dynamique susceptible d’améliorer les conditions et cadre de vie de la majorité des populations congolaises vivant dans le monde rural a été chiffré à 1,66 milliards de USD. Cette somme devait servir à : développer les infrastructures économiques, l’économie rurale et chaine des valeurs locales, renforcer les capacités.
En lançant ce projet sur toute l’étendue de la république au même moment, le gouvernement s’attendait aux résultats ci-après :
- L’accès des populations de 145 territoires aux infrastructures de base ;
- L’amélioration significative des services socioéconomiques de base ;
- L’accroissement de leurs activités économiques et de leur bien-être ;
- Les économies des territoires ruraux sont revivifiées et dynamisées ;
- Le renforcement des capacités de gestion du développement local des acteurs étatiques territoriaux et communautaires ;
- Le développement et l’opérationnalisation du système d’information géo référencé interopérable de suivi.
III. L’ANALYSE DE LA GESTION PREVISIONNELLE DES EMPLOIS ET COMPETENCES DES CADRES TERRITORIAUX ET LE DEVELOPPEMENT LOCAL EN RD CONGO
III.1. Les considérations générales sur la gestion prévisionnelle des emplois et compétences des cadres territoriaux
III.1.1. La compréhension du concept gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des cadres territoriaux
Notons qu’il n’y a pas d’unanimité dans la définition de ce concept. Plusieurs chercheurs, chacun a mis l’accent sur un aspect particulier. C’est le cas de Citeau (2008) et Henri Rouilleault (2007) cités par Toussaint Tshilombo (2020 ).
Nous pouvons dire que la gestion prévisionnelle d’emploi, des compétences des cadres territoriaux est un processus qui vise à ajuster, à court et moyen termes, les postes, les effectifs et les compétences aux besoins découlant de la stratégie des entités administratives décentralisées et déconcentrées ainsi qu’aux changements dans leurs contextes économique, technologique, social et juridique. Cette démarche proactive en gestion des ressources humaines » des agents publics de l’Etat » aide à naviguer à travers le changement. La GPEC permet une approche collective pour adresser les enjeux liés à l’emploi et aux compétences, et pour élaborer des solutions intégrées qui répondent simultanément aux besoins des milieux ruraux, urbaines, des provinces et de la population.
III.1.2. Les socles de la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences des cadres territoriaux.
La gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences des cadres territoriaux relève de la stratégie du management des agents publics de l’Etat. C’est pourquoi, selon Alfred Chandler (1989) cité par Toussaint Tshilombo (2020), cette stratégie consiste à « déterminer les objectifs et les buts à long terme d’une organisation, puis à choisir les modes d’action et allocation des ressources qui permettront d’atteindre ces mêmes buts ». Cette démarche et son résultat font l’objet de multiples communications auprès des différentes parties prenantes (management, personnel, etc.) et doivent être formalisés dans le cadre des informations, des consultations avec les représentants du personnel.
Ainsi, la gestion prévisionnelle des emplois et compétences est assis sur des socles évidents pour son développement reprenant les phases ci-après » Crispin David Mwengemomungu (2023): la cartographie des emplois et des compétences, les besoins en effectifs, les besoins en compétences, l’analyse des écarts, la mise en place un plan d’action, mesurer les résultats.
En effet, les enjeux de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences sont de déterminer les évolutions des emplois, des missions et des compétences, et de prévoir les mouvements d’effectifs à organiser à moyen terme pour répondre aux besoins de l’entreprise. Elle se traduit par l’anticipation et la planification des différentes actions à mener dans le but de pérenniser l’activité de l’entreprise. Il s’agit d’une démarche de gestion proactive des ressources humaines basée sur le management des compétences.
III.1.2. Du recrutement des cadres territoriaux en RD Congo
Conformément aux dispositions des articles 2,3,4,5 et 6 de la loi organique n°010/011 du 18 mai 2010 portant fixation des subdivisions territoriales à l’intérieur des provinces, les entités territoriales ci- après composent la province : la Ville en Communes, la Commune en Quartiers et/ou en Groupements incorporés, le Territoire en Communes, Secteur et/ou Chefferies, le Secteur ou Chefferie en Groupement, le Groupement en Villages.
Deux modes de recrutement sont prévus selon la nature juridique de chaque entité. Il y a les élections pour certains, cas de la ville, commune urbaine et nomination pour les autres, cas de territoires. Ainsi, l’article 9 de la loi organique n° 010/011 du 18 mai 2010 note que nul ne peut être nommé Administrateur de Territoire ou Administrateur de Territoire Assistant, s'il ne remplit les conditions suivantes : être de nationalité congolaise, être âgé de 25 ans révolus, être porteur d'un diplôme d'études supérieures ou universitaire et justifier d'une expérience de 5 ans au moins dans l'administration publique, être de bonne vie et mœurs.
Le Chef de Quartier est nommé par Arrêté du Bourgmestre délibéré en Collège Exécutif communal, parmi les agents de la fonction publique. Ainsi, nul ne peut être nommé Chef de Quartier ou Chef de Quartier Adjoint s'il ne remplit les conditions suivantes : être de nationalité congolaise, être âgé de 25 ans révolus, être porteur d'un diplôme d'études secondaires et justifier d'une expérience professionnelle de 3 ans au moins, être de bonne vie et mœurs.
De ce qui précède, nous ne sommes pas loin de constater que les cadres territoriaux des entités décentralisées sont des politiciens car ils sont élus sur base des listes présentées par les partis politiques. Ils se retrouvent à leur de ces entités à la suite des conciliabules politiques et par les jeux des alliances des familles politiques. Alors que ceux des entités déconcentrées sont des ‘’véritables agents publics de l’Etat’’.
III.2. Les cadres territoriaux et le projet PDL-145 Territoires
Le projet PDL-145 territoires a connu deux principales phases avec les cadres territoriaux, à savoir la phase préparatoire et celle d’exécution.
III.2.1. De la préparation du projet PDL- 145 Territoires
Lors de nos enquêtes sur terrain, les sources locales1 nous renseignent que la préparation du projet PDL-145 s’est fait à deux étapes : en mars 2021 et octobre 2021 avec des équipes des experts dépêchés par le gouvernement central pour travailler les parties prenantes locales. Il s’en était suivi les travaux de consolidation.
III.2.2. De l’exécution du projet PDL- 145 Territoires2
L’exécution du projet PDL-145 territoire n’a pas commencé sur toute l’étendue de la république au même moment en raison de plusieurs contraintes liées au déploiement des matériels et des techniciens. De façon générale, dans les provinces du Grand Katanga, le mois de septembre 2022 a été consacré pour la vulgarisation du projet au niveau des territoires, secteurs/chefferies, groupements et villages par les ‘’portes drapeaux’’ PDL. Il s’agit des personnes influentes sélectionnées capable d’influencer la population dans l’acceptabilité du projet. Celles-ci étaient dépêchées à Kinshasa pour une formation appropriée et déployées sur terrain.
Il s’en est suivi le déploiement des entreprises qui avaient gagné les marchés de construction des infrastructures de base. La supervision est assurée, au niveau de chaque province, par le responsable de l’antenne de l’une des agences de développement à qui le gouvernement avait confié la charge de suivre les travaux.
Dans le planning initial, le projet avait une durée de six mois c’est-à-dire commencés à septembre 2022, à mars 2023, chaque entité territoriale devait réceptionner les ouvrages, clés à la main.
Notons que jusqu’aujourd’hui les travaux ne sont pas encore terminés et tous sont presque aux arrêts.
III.3. L’analyse et perspectives du projet PDL- 145 Territoires
III.3.1. L’analyse du projet PDL-145 territoires face à la GPEC des cadres territoriaux
Nous venions de relever ci-haut que le projet PDL-145 territoires avait commencé par la consultation organisée à mars 2021 au niveau de chaque territoire et secteur/chefferie. Tous les cadres territoriaux étaient associés à la conception, élaboration du projet et localisation des sites qui devaient accueillir les infrastructures de base. Ils étaient également, tous, associés aux travaux de consolidation et de validation des données effectués au niveau de chaque province.
En tant qu’autorités locales, elles avaient, entre autres comme charge, d’accompagner le projet jusqu’à la remise des ouvrages, assurer la sécurité des travaux, l’inspection des travaux et le reporting à la hiérarchie.
Au-delà de tout, elles avaient le rôle d’encadrement de la population locale dans l’acceptabilité du projet et la prise en charge locale.
Cependant, trois mois après le début de l’exécution du projet PDL-145 territoires, il y aura un chambardement total au niveau de la petite territoriale avec la nomination par l’ordonnance présidentielle n°22/239 du 18 novembre 2022 portant nomination et affectation des Maires, des Administrateurs du territoire et des Bourgmestres des communes urbaines, Kinshasa de 145 nouveaux administrateurs des territoires et de 290 administrateurs du territoire adjoints.
Cette ordonnance sera suivie par l’arrêté ministériel n°25/CAB/VPM/MININTERSECAC/PKK/214/2023 du 25 juillet 2023 modifiant et complétant l’arrêté ministériel n°25/CAB/VPM/MININTERSECAC/PKK/203/2023 du 18 juillet 2023 portant nomination de 478 chefs des secteurs de la République Démocratique du Congo (République démocratique du Congo 2022).
L’analyse de la gestion prévisionnelle des emplois et compétences de ces recrutements nous a amené à prendre contact avec le Secrétariat général du ministère de l’intérieur, dans sa direction des ressources humaines. De nos enquêtes, il se dégage qu’il n’existe aucun dossier physique des cadres territoriaux nommés et aucune procédure de recrutement n’en était déclenchée. Jusque-là rapport n’est fait par ces cadres sur le déroulement et l’exécution du projet PDL-145 territoires.
Et pourtant, comme nous avions vu ci-haut, cette démarche liée à la logique de la gestion prévisionnelle des emplois et compétences des cadres territoriaux devait s’appuyer sur une étude de la cartographie des emplois et compétences requises aux administrateurs du territoire et des chefs de secteur, la détermination des besoins en effectifs et en compétences. Ce qui pourrait déboucher à l’analyse des écarts entre ce qui existe et les besoins réels dans la territoriale par rapport au projet de développement local, PDL-145 territoires. C’est seulement dans ces conditions qu’un plan de recrutement aurait été mise en place.
Les enquêtes nous ont relevé que nous pouvons avoir la réponse à cette préoccupation dans les états-majors des familles politiques. En effet, c’est à ce niveau que le recrutement avait eu lieu pour récompenser les militants des partis politiques et préparer les élections municipales, locales, provinciales, nationales et présidentielles de décembre 2023. Il est sans conteste que le parti au pouvoir, l’Union pour le Développement et le Progrès Social, UDPS en sigle et alliés ont été la pépinière de recrutement.
Les changements à la tête de ces entités se sont effectués sans remise-reprise, brisant ainsi, le principe de la continuité de l’Etat. Les nouveaux nommés, des’’ parvenus’’ dans la territoriale n’ont aucune expérience professionnelle et aucune connaissance dans les domaines en rapport avec le développement local des entités administratives décentralisées ou déconcentrées. Ils n’ont aucun repère.
III.3.2. Les perspectives à envisager pour le projet PDL-145 Territoires
Pour une meilleure perspective, nous pouvons partir du principe selon lequel on ne peut pas développer un peuple mais plutôt on aide ou accompagne un peuple à se développer. Le développement initié par le sommet stratégique a peu chance de réussir s’il n’y a pas des soubassements locaux de prise en charge par la base. C’est le cas que nous pouvons noter du projet de PDL-145 Territoires initié par le gouvernement central.
En effet, à l’analyse du projet PDL-145 territoires, nous nous rendons compte que l’architecture organisationnelle et de suivi est mieux assurée au niveau de sommet stratégique et moins au niveau de la base. Le sommet a eu suffisamment du temps pour préparer le projet et mettre en place des structures de management, de suivi et d’évaluation. Toute une ordonnance présidentielle a été signée pour créer ces structures, déterminer les modalités de leurs fonctionnements tant au niveau national que provincial. Alors qu’au niveau de la base, aucune structure n’a été formalisée. C’est pourquoi, pour la bonne marche du projet, les gouverneurs de province devraient prendre des actes administratifs » des édits » pour organiser les comités locaux d’accompagnement du projet. Les modalités de collaboration entre les agences de suivi, les entreprises d’exécution, les autorités territoriales locales doivent être clairement définies et connues de toutes les parties prenantes.
Pour ce qui est des cadres territoriaux, ils doivent être formés dans les domaines de la territoriale du développement locale et évalués régulièrement. Pour la relance du projet PDL-145 territoires, il y a une impérieuse urgence non seulement de lancer des ateliers d’implémentation du projet dans le chef des autorités administratives nommées et affectées mais également de requalifier certains sites et infrastructures.
Qu’à cela ne tienne, l’administration publique devrait intégrer et appliquer la gestion prévisionnelle des emplois et compétences des agents publics de l’Etat dans leurs directions des ressources humaines.
CONCLUSION
Notre étude a porté sur l’analyse de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des cadres de la territoriale et leur impact sur le projet pdl-145 territoires en RD Congo.
Les préoccupations qui nous ont animé, dans cette recherche, étaient celles de savoir, d’une part, est-ce que la gestion des cadres de la territoriale en RD Congo était assise sur une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et quelles seraient les implications de cette politique sur le projet PDL 145- territoires et d’autre part, étant donné que le gouvernement a déjà investi beaucoup d’argents, qu’est-ce qu’il faut faire pour sauver les meubles ?
De ce qui précède, il se dégage que la RD Congo n’applique la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences des cadres territoriaux qui sont, du reste, des agents publics de l’Etat. La territoriale est désormais politisée au lieu d’être un outil de l’administration publique.
Cette politique de gestion du personnel politico-administratif de l’Etat n’est pas sans conséquence dans le projet PDL-145 territoires. Aujourd’hui, pour des intérêts inavoués certains sites et infrastructures sont bloqués par les nouvelles autorités. Ce qui fait que le projet est devenu source de conflits de certaines communautés, villages.
Qu’à cela ne tienne, étant donné que le projet PDL-145 territoires constitue, désormais, un enjeu de développement locale de notre pays, il doit être relancé. Pour ce faire, nous pensons qu’il y a lieu, pour sauver les meubles, d’envisager une relecture du projet s’avère nécessaire pour vider des petites sources des conflits communautaires et des villages, la formation systématique des nouveaux cadres territoriaux dans les différents domaines de la territoriale du développement local et la formation des cadres territoriaux dans l’implémentation du projet PDL-145 territoires.
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